Le couple face au cancer du sein : aimer au cœur de l’épreuve
Le cancer du sein bouleverse bien plus que le corps : il ébranle le couple, l’intimité et la communication. Comment continuer à s’aimer, à se parler, à se soutenir quand la maladie s’invite dans la relation ?
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Chrystelle Oeuvrard-Moreau
10/16/20255 min read


Le couple face au cancer du sein : aimer au cœur de l’épreuve
Octobre Rose est, chaque année, l’occasion de rappeler l’importance du dépistage du cancer du sein, mais aussi de parler de tout ce que cette maladie vient bouleverser — bien au-delà du corps. Quand le diagnostic tombe, c’est souvent tout un équilibre de vie qui vacille : le rapport à soi, au temps, à la féminité… et bien sûr, au couple.
Le cancer du sein ne touche jamais une seule personne : il impacte aussi le partenaire, la relation, l’intimité, la manière d’être ensemble. C’est une traversée qui demande écoute, adaptation et tendresse, dans un contexte souvent fait de peur, de fatigue et de perte de repères.
Le choc du diagnostic : un séisme à deux
L’annonce d’un cancer du sein agit comme un coup de tonnerre. Pour celle qui le vit, c’est un moment d’effroi, de sidération, parfois d’incrédulité. Pour le partenaire, c’est une confrontation brutale à la fragilité de l’autre, et souvent à sa propre impuissance.
Très vite, le quotidien s’organise autour des soins : rendez-vous médicaux, traitements, effets secondaires, décisions chirurgicales… Mais derrière cette logistique, il y a un bouleversement plus intime : les émotions s’entremêlent, la communication devient parfois difficile, et chacun cherche sa place dans une situation où rien n’est plus comme avant.
L’intimité mise à l’épreuve
Le corps change, se transforme, se fatigue. Il porte désormais des cicatrices visibles ou invisibles. La perte d’un sein, la chute des cheveux, les effets hormonaux ou la ménopause précoce viennent souvent ébranler l’image de soi.
Beaucoup de femmes témoignent d’un sentiment d’altération : « Je ne me reconnais plus », « Je ne me sens plus désirable ». Cette souffrance touche directement la relation amoureuse.
La sexualité est souvent perturbée. D’après les études, près de deux tiers des femmes atteintes d’un cancer du sein déclarent une modification de leur vie intime. Le désir se fait plus rare, la fatigue domine, la peur de la douleur ou du rejet s’installe. Parfois, le partenaire se tait par pudeur, ou par peur de « mal faire ».
Et pourtant, l’intimité ne se résume pas à la sexualité. Beaucoup de couples qui traversent la maladie redécouvrent d’autres formes de tendresse : le contact d’une main, un regard, une étreinte silencieuse. Ces gestes simples permettent de maintenir le lien affectif, même quand le corps se met à distance.
Ce que disent les chiffres : entre fragilité et force
Les études montrent que le cancer peut fragiliser le couple — mais il ne le condamne pas.
Selon les données françaises, deux ans après un diagnostic de cancer, près de 80 % des couples sont toujours ensemble. Parmi eux, plus d’un tiers affirment même que leur lien s’est renforcé.
Mais il existe aussi une réalité plus dure : lorsqu’une femme tombe gravement malade, le risque de rupture est environ six fois plus élevé que lorsque c’est l’homme qui est atteint. Environ une femme sur cinq serait quittée dans les deux années suivant le diagnostic.
Des chiffres qui rappellent à quel point le soutien du partenaire, l’écoute et la communication sont essentiels.
Quand la communication devient un soin
Face à la maladie, beaucoup de couples cessent de se parler vraiment. Par peur de blesser, par fatigue ou parce que les mots semblent trop lourds : on se sait plus quoi se dire.
Et pourtant, la parole est souvent la clé pour traverser cette épreuve ensemble. Dire ce que l’on ressent, ce que l’on redoute, ce que l’on désire encore — ou qu’au contraire, on ne veut plus, mettre des mots sur le vécu.
Ce dialogue, même imparfait, permet de maintenir un espace vivant dans le couple.
Le soutien conjugal ne se résume pas à être « fort ». Il s’agit souvent d’être présent, attentif, à l’écoute, même sans solution immédiate. D’accepter que l’autre ait peur, qu’il soit en colère, qu’il doute. Et de se rappeler que, dans cette épreuve, personne n’a à jouer un rôle parfait.
Ce qui protège le couple
Certaines relations ressortent de la maladie plus solides qu’avant. Ce qui les protège ?
Une communication ouverte et bienveillante, même sur les sujets sensibles.
Le soutien concret du partenaire, sans infantiliser ni fuir.
L’accès à des soins de support : prise en charge de la douleur, psychologues, sexologues, groupes de parole, soins onco-esthétiques, activité physique adaptée (APA)…
La capacité à adapter la sexualité : explorer d’autres formes d’intimité, sans pression.
L’entourage, les amis, la famille, qui permettent de souffler et de se sentir entourés.
Ce sont souvent ces ressources qui font la différence entre un couple qui s’éteint dans le silence et un couple qui réinvente sa façon d’aimer.
Quand la séparation survient
Malgré tout, certaines histoires s’arrêtent. Parce que la maladie amplifie des fragilités déjà existantes, parce qu’elle confronte à des émotions que le couple ne sait pas accueillir.
Ces ruptures ne sont pas toujours des abandons ; parfois, elles sont le résultat d’une usure, d’une incompréhension, d’une peur trop grande.
Les femmes qui traversent à la fois la maladie et la séparation cumulent alors deux blessures : celle du corps et celle du cœur. Il est essentiel qu’elles puissent, elles aussi, être accompagnées, soutenues, reconnues dans ce qu’elles vivent.
Un espace d’écoute, un groupe de parole, un accompagnement conjugal ou familial peuvent être d’une aide précieuse pour se reconstruire.
Traverser, ensemble
Le cancer du sein ne se traverse jamais seul.
Chaque couple va à son rythme : certains se rapprochent, d’autres se redécouvrent, quelques-uns se perdent. Mais tous affrontent quelque chose d’immense.
Ce qui aide le plus ? Se rappeler que l’amour ne se mesure pas à la force, mais à la présence. Qu’il n’y a pas de bonne manière d’aimer pendant la maladie, seulement des tentatives sincères de rester en lien.
Octobre Rose, c’est aussi cela : rendre visible cette réalité intime, parler du couple, de la tendresse, de la sexualité, des fragilités et des élans de vie.
Parce qu’aimer, même au cœur du cancer, reste une forme de résistance, de beauté et d’espoir.
Ressources utiles pour les couples confrontés au cancer du sein
La Ligue contre le cancer
👉 Propose un accompagnement psychologique, des groupes de parole, des soins de support et de l’aide sociale.
🔗 www.ligue-cancer.net
Cancer Info (Institut National du Cancer)
👉 Informations fiables sur les traitements, la vie intime, les effets secondaires et la reconstruction.
🔗 www.cancer.fr
Les soins de support
👉 Psychologues, sexologues, kinésithérapeutes, onco-esthéticiennes... Ces professionnels peuvent aider à traverser les impacts physiques et émotionnels de la maladie.
Les groupes de parole et accompagnements (individuel ou en couple) au cabinet Tasukeru
👉 Des espaces pour parler, déposer, comprendre ce que la maladie fait vivre au couple et à la famille.
📍 En ligne ou à Saint-Étienne