Le pouvoir des mots : quand les artistes s'engagent contre les violences faites aux femmes

La chanson a toujours été un miroir de la société. Depuis quelques années, de plus en plus d’artistes choisissent de mettre en lumière une réalité longtemps reléguée au silence : les violences faites aux femmes. Par leurs mots, ils participent à libérer la parole, à sensibiliser le grand public et à déconstruire des préjugés encore trop tenaces.

VIOLENCES FAITES AUX FEMMES

Chrystelle Oeuvrard-Moreau

9/30/20253 min read

a woman with her head in her hands leaning against a wall
a woman with her head in her hands leaning against a wall

Le pouvoir des mots : quand les artistes s'engagent contre les violences faites aux femmes

La chanson a toujours été un miroir de la société. Elle accompagne les joies, les révoltes, les espoirs et les blessures. Depuis quelques années, de plus en plus d’artistes choisissent de mettre en lumière une réalité longtemps reléguée au silence : les violences faites aux femmes. Par leurs mots, ils participent à libérer la parole, à sensibiliser le grand public et à déconstruire des préjugés encore trop tenaces.

Des mots qui dénoncent

« Quand j'ai crié à l'aide, tu m'as dit "C'est ta faute"

Pleurer à perdre haleine, tu m'as dit "C'est ta faute" »

(Marine, « Ma faute », Sony Music)

Lorsque Marine chante « Ma faute », elle ne décrit pas simplement une histoire d’amour abîmée. Elle met en lumière l’engrenage de la culpabilité et de l’emprise psychologique : ce mécanisme qui fait croire à la victime que « si ça va mal, c’est de sa faute » :

En choisissant ces mots simples, elle touche directement ceux et celles qui ont vécu des violences verbales ou morales, souvent invisibles de l’extérieur.

« Personne n'a voulu écouter

Les cris, les coups, une vie dévastée

Que c'est dur d'aimer jusqu'à en crever »

(G.Lanvin ,M.Lanvin, « Appel à l’aide », Eko Music France)

À l’inverse, Gérard Lanvin, dans « Appel à l’aide », prend le parti d’une dénonciation frontale. Il parle de féminicides, de ces femmes victimes de « l’inconcevable ». Ses paroles ne se contentent pas de décrire, elles interpellent la société et appellent à la solidarité. Le fait que l’intégralité des bénéfices soit reversée à une association de soutien renforce encore la portée de ce message engagé.

D’autres artistes, comme Rita Tabbakh avec « Je me suis perdue » ou Suzane avec « Je t’accuse », s’inscrivent dans la même démarche : mettre des mots justes sur des réalités trop souvent tues.

Le poids des paroles

La force de la chanson est d’associer le texte à la musique. Les mots répétés, scandés ou murmurés résonnent différemment qu’un discours ou qu’un article de presse. La chanson entre dans l’intimité, elle accompagne les trajets, les soirées, les moments de solitude. Elle rend audible ce qui reste caché derrière les portes closes.

Là où les victimes n’osent pas toujours parler, une chanson peut parfois servir de révélateur : « Ce que je vis, quelqu’un d’autre l’a vécu. Ce que je ressens a été mis en mots. Je ne suis pas seule. »

« Pourquoi elle ne l’a pas quitté ? » : déconstruire un préjugé

Une des phrases les plus blessantes que peuvent entendre les victimes est : « Mais pourquoi elle ne part pas ? ». Derrière ce jugement se cache une méconnaissance profonde des mécanismes de la violence conjugale.

Quitter un conjoint violent ne relève pas de la simple décision rationnelle. C’est affronter la peur des représailles, la dépendance affective ou financière, la honte, la culpabilité. C’est aussi lutter contre l’emprise : cette toile invisible qui enferme la victime dans une spirale où l’agresseur finit par devenir à la fois source de douleur et seule référence affective.

Les chansons qui abordent ce thème permettent de montrer, par l’émotion, ce que les explications théoriques peinent parfois à faire comprendre. Elles donnent à ressentir la complexité, la peur, l’ambivalence.

Un engagement collectif

En choisissant de chanter ces réalités, les artistes s’exposent, mais ils offrent aussi une tribune à celles et ceux qui n’ont pas encore trouvé leur voix. Chaque refrain, chaque couplet contribue à briser le silence.

Ces œuvres s’inscrivent dans un mouvement plus large, où la société civile, les associations, les professionnels et les citoyens s’engagent pour faire reculer les violences sexistes et sexuelles. Elles rappellent que le combat ne se mène pas uniquement dans les tribunaux ou les foyers d’accueil, mais aussi dans les esprits et dans les cœurs.

Les chansons qui parlent de violences faites aux femmes ne sont pas de simples divertissements : elles sont des actes de courage et de solidarité. Elles rappellent que les mots comptent, qu’ils peuvent blesser mais aussi guérir, réveiller les consciences, et offrir un espace d’identification et de soutien.

Alors, la prochaine fois que vous entendrez un couplet sur l’emprise, un refrain sur la douleur ou un cri de détresse, prêtez attention. Car au-delà de la musique, c’est un appel à voir, à comprendre, et à agir.