L'impact psychologique des aidants familiaux face aux maladies graves ou neurodégénératives

Découvrez l’impact psychologique des aidants familiaux face à la maladie et l’intérêt des groupes de parole pour rompre l’isolement et se ressourcer.

Chrystelle Oeuvrard-Moreau

5/28/20253 min read

L'impact psychologique des aidants familiaux face aux maladies graves ou neurodégénératives

Pourquoi les groupes de parole sont une ressource précieuse ?

Lorsque la maladie frappe un proche – que ce soit un cancer, une sclérose en plaques, une maladie de Parkinson ou encore une maladie d’Alzheimer – c’est souvent la sphère familiale qui se mobilise en première ligne. Conjoint, parent, enfant ou frère, sœur : l’aidant familial devient pilier du quotidien. Ce rôle, aussi essentiel que silencieux, s'accompagne d’un poids psychologique souvent méconnu, voire ignoré.

Le rôle de l’aidant : entre engagement et épuisement

Accompagner une personne atteinte d’une maladie grave ou neurodégénérative ne se résume pas à des gestes du quotidien. Il s’agit d’un engagement affectif profond, dans une relation où les repères évoluent sans cesse. Le rôle de l’aidant peut inclure la gestion des traitements, l'organisation des soins, le soutien émotionnel, la coordination avec les professionnels de santé, et parfois même la prise de décisions complexes.

Cette charge est souvent cumulative et progressive. Plus la maladie avance, plus la dépendance du proche s’intensifie, et plus l’aidant se retrouve absorbé, parfois jusqu’à l’oubli de soi. Il est courant d’entendre les aidants dire : « Je n’ai plus de temps pour moi », « Je ne me reconnais plus », « Je tiens bon, mais je suis à bout ».

L’impact psychologique : un coût invisible

Les conséquences psychologiques de ce rôle sont multiples :

  • Stress chronique : lié à la vigilance permanente, à l’anticipation de l’imprévisible, à la peur de mal faire.

  • Anxiété et culpabilité : l’impression de ne jamais en faire assez, ou de ne pas être à la hauteur.

  • Isolement social : le retrait progressif de la vie sociale, professionnelle et familiale.

  • Fatigue émotionnelle : vivre au rythme des hauts et des bas de la maladie, sans espace pour exprimer sa propre souffrance.

  • Dépression : chez certains aidants, un sentiment d’impuissance ou de désespoir peut s’installer, surtout lorsque l’évolution de la maladie semble inéluctable.

Cette souffrance est d’autant plus difficile à exprimer que l’aidant ne se sent pas toujours légitime : « Ce n’est pas moi le malade », « Je dois être fort pour lui/elle ». Il en résulte un silence pesant, voire une forme d’auto-censure affective.

Les maladies neurodégénératives : une épreuve relationnelle

Dans le cas des maladies neurodégénératives, l’aidant est confronté à une transformation profonde du lien à l’autre. La communication se modifie, les souvenirs s’effacent, les rôles s’inversent. Il n’est pas rare que l’aidant conjugal se sente devenir "parent" de son partenaire, ou qu’un enfant se voie attribuer des responsabilités parentales envers son propre père ou sa mère.

Ce bouleversement identitaire peut être déstabilisant : « Qui suis-je dans cette relation désormais ? » La charge émotionnelle est intense, d’autant que ces maladies s’inscrivent dans la durée, parfois sur plusieurs années. L’usure psychique devient alors un risque majeur.

Le groupe de parole : un espace pour souffler, comprendre, se relier

Face à cet isolement émotionnel, les groupes de parole pour aidants représentent une ressource précieuse. Ils offrent un espace sécurisé, encadré par un professionnel, où l’on peut déposer ses mots, ses maux, et trouver un écho bienveillant auprès d’autres personnes vivant des réalités similaires.

Les bienfaits sont multiples :

  • Rompre l’isolement : en rencontrant d’autres aidants, chacun réalise qu’il n’est pas seul à traverser ces difficultés.

  • Mettre des mots sur ce que l’on vit : cela permet de mieux comprendre ses émotions, de les légitimer, de les apaiser.

  • Partager des expériences concrètes : astuces, soutiens, ressources locales, démarches administratives... tout cela circule au sein du groupe.

  • Se reconnecter à soi : prendre un temps pour soi, même court, c’est déjà reprendre un peu de souffle dans le tumulte quotidien.

  • Favoriser la résilience : en se sentant compris et soutenu, l’aidant retrouve souvent de l’énergie, du sens, parfois même une nouvelle façon d’envisager la relation d’aide.

Un accompagnement respectueux et humain

Au Cabinet Tasukeru, les groupes de parole pour aidants sont pensés comme des bulles de respiration. Chacun peut venir tel qu’il est, avec ses forces, ses fragilités, son vécu. Aucune obligation de parler, aucune injonction à aller mieux : simplement un espace pour écouter, comprendre et transformer ce qui se joue dans le lien aidant-aidé.

Ces groupes ne remplacent pas un suivi thérapeutique individuel s’il est nécessaire, mais ils offrent une complémentarité précieuse, notamment dans les situations de surcharge émotionnelle, de deuil anticipé, ou de solitude.

Conclusion : prendre soin de ceux qui prennent soin

Les aidants familiaux sont les piliers invisibles du système de soins. Ils méritent d’être entendus, soutenus, et accompagnés. Reconnaître leur souffrance psychologique n’est pas un aveu de faiblesse, mais un acte de lucidité et de prévention.

Intégrer un groupe de parole, c’est déjà poser un premier pas vers soi. C’est reconnaître que pour continuer à prendre soin de l’autre, il est essentiel de ne pas s’oublier en chemin.